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L’académie d’Ostéopathie organise deux conférences croisées de Victor Lopez et Léo Bernard sur les liens historiques entre l’ostéopathie et les courants ésotériques.

Elles auront lieu le samedi 16 novembre 2024 de 14h à 18h, en présentiel, à l’hôtel CIS Paris Ravel et en distanciel, sur Zoom.

 

Victor Lopez

Au travers de l’étude des courants spirituels de la fin du XIXe siècle aux Etats-Unis, et en suivant leur influence jusqu’en France, cet exposé a pour but de chercher dans l’ostéopathie quels sont les liens que cette dernière a entretenus avec les mouvements occultes. Ainsi, par l’étude de certains textes et en observant l’évolution de la pensée ostéopathique, ce travail a pour but de saisir quelle serait la dimension ésotérique d’un savoir ostéopathique. »

Léo Bernard

Basée sur le contenu de son nouvel ouvrage à paraître le 19 septembre 2024 aux Presses universitaires de Rennes : Hippocrate initié. Courants ésotériques et holisme médical en France durant l’entre-deux-guerres, cette communication se propose de revenir sur les activités et les écrits de Robert Lavezzari (1886-1977), pionnier de la pratique ostéopathique en France. Son œuvre sera analysée en lien avec l’essor de l’homéopathie et du holisme médical durant les années 1920-1930 ; un contexte également marqué par l’importance de théories et de pratiques diffusées au sein des courants ésotériques.

 

Cette double conférence se tiendra à Paris 12ème, hôtel CISP Ravel, 6 av. Maurice Ravel

et en visio conférence sur zoom

Inscriptions >ici<

Conférence ouverte à tous les ostéopathes, adhérents, anciens adhérents, et non adhérents à l’AOF (adhésion, ré adhésion ici…)

 

Léo Bernard est docteur en histoire de l’École pratique des hautes études – Université PSL. Historien de la santé et des religions, il est l’actuel président de l’Association francophone pour l’étude universitaire des courants ésotériques (FRÉSO).

Victor Lopez est ostéopathe depuis 2017, titulaire d’un master 2 d’histoire de l’art (2008, Université de Nantes) et d’un DU de philosophie de l’ostéopathie (Ucly, 2020). Après avoir enseigné l’histoire de l’architecture et l’art médiéval, il s’est orienté vers des études d’ostéopathie. Depuis 2017, il a travaillé en collaboration avec Jean-Marie Gueullette sur des questions liées aux origines de l’ostéopathie et depuis 2022 avec Pierre-Luc L’Hermite sur des thématiques concernant l’histoire de l’ostéopathie en France. Il a publié, avec Jean-Marie Gueullette, La présence d’Andrew Taylor Still, Sully, Vanne, 2020, traduction et édition critique de l’ouvrage d’Arthur Grant Hildreth publié en 1938. Et Le mythe de la consultation traditionnelle, in Mythologies ostéopathiques, dirigé par Pierre-Luc l’Hermite, L’Harmattan, Paris, 2024, un ouvrage collaboratif qui se propose d’interroger certains éléments de la tradition ostéopathique.

 

Dès ses origines, l’ostéopathie a entretenu des liens avec la pensée ésotérique. Les premiers éléments se rapportent à l’intérêt qu’A.T. Still montre au spiritualisme, lequel connait un essor durant la seconde moitié du XXe siècle, particulièrement après le succès que connaissent les sœurs Fox aux États-Unis.

Assister à des séances de spiritisme devient alors relativement commun, et cette mode va aussi s’établir et se développer en France, grâce à la figure d’Allan Kardec. Aujourd’hui, la religion spirite est encore très pratiquée au Brésil et connait des milliers d’adeptes.

Ainsi, cette mode ne se cantonne pas à une simple pratique, elle entraine un champ de réflexion métaphysique, ainsi qu’une influence dans les milieux intellectuels et artistiques.

La fin du XIXe siècle aux États-Unis est un terreau fertile pour que se structurent des formes de pensées religieuses nouvelles. Le meilleur exemple est sans aucun doute la théosophie, qui a un vif succès et qui en quelques années va être propulsée dans le monde entier. Sa fondatrice, Héléna Blavatski, organise sa doctrine autour d’un syncrétisme qui vise à établir un pont entre la pensée chrétienne occidentale et la pensée hindouiste ainsi que les traditions orientales. En Europe, la théosophie reçoit un accueil particulièrement chaleureux et les idées d’Héléna Blavatski s’y développent sans difficulté avant que Rudolph Steiner ne génère un schisme au sein de la théosophie afin de créer un autre mouvement spirituel : l’anthroposophie.

Une caractéristique frappante de l’ostéopathie, est qu’elle semble se détacher progressivement de la pensée ésotérique. 

D’une part, cela peut se comprendre par la volonté de Still de fonder sa méthode thérapeutique sur la science. D’autre part, une difficulté d’ordre anthropologique (au sens de la définition ostéopathique de l’homme) est irrésolue dans la conceptualisation de Still. Still répète que l’homme est triune, or il n’en fait pas la démonstration et nous laisse, lecteur, bien démuni quant à la manière dont s’articulent le corps, l’esprit et l’âme. Laisserait-il le soin à ses lecteurs de faire ce travail ? Il est permis d’en douter dès lors que l’on considère la manière dont il considère le corps : une machine.

S’agit-il d’un héritage de la théologie naturelle ?

L’histoire de l’ostéopathie rencontre alors une période lacunaire pendant laquelle il n’est que rarement question d’une conceptualisation de la force vitale au sein de la machine humaine. A l’exception d’un ouvrage de 1908 : Esoteric Osteopathy, il n’existe pas d’ouvrage avant les textes de Sutherland qui rétablissent l’ostéopathie du côté d’un vitalisme décomplexé.

Les ostéopathes qui s’inscrivent dans la lignée de Still et qui structurent le paysage de la profession ne semblent en aucun cas gênés de montrer leur appartenance à des mouvements religieux. Toutefois, ils appartiennent pour la plupart à des églises protestantes.

Qu’aucun élément ne permettant d’identifier une filiation de pensée ésotérique entre Still et ses disciples ne serait pas étonnant. Bien au contraire, la pensée ésotérique étant par nature une voie de connaissance secrète qui nécessite d’être transmise dans un processus initiatique éloigné du regard du monde extérieur. Pourrions-nous voir ici les traces de cette tradition orale fantasmée des ostéopathes ? De cette nécessité d’aller toujours au plus près de la source pour être baigné de sa pureté ?

Si le développement de l’ostéopathie aux États-Unis tend à se faire dans des structures jouxtant, ou juxtaposant la médecine classique, le premier jet, la première tentative de diffusion de l’ostéopathie en France est à mettre en lien direct avec des mouvements de pensée appartenant à la nouvelle pensée. Moutin et Mann, les deux auteurs d’un ouvrage sur l’ostéopathie paru en 1912 sont investis dans le milieu de la pensée ésotérique. Toutefois leur ouvrage n’a pas connu un grand succès et il est presque tout à fait oublié aujourd’hui. La figure historique émergente de l’ostéopathie en France est celle du Dr Robert Lavezzari. A priori, son statut de médecin pourrait l’écarter de toutes croyances ésotériques. Pourtant, les travaux récents en histoire de la médecine, notamment la thèse de Léo Bernard, fait la lumière sur les liens étroits que Lavezarri entretenait avec les homéopathes, les naturistes, l’astrologie et plus frappant encore l’anthroposophie.

A nouveau, il est intéressant de voir que la manière dont les ostéopathes se sont emparés de l’ostéopathie reste particulièrement tournée vers le versant mécaniste. Les ouvrages de Lavezzari n’expriment pas de point de vue sur la manière dont le corps est mû par l’esprit.

La tentation qui pousserait les ostéopathes actuels à associer la vie spirituelle de leur prédécesseur à leur considération pratique et technique ne relève d’aucune évidence. Faire une caractéristique d’une anthropologie triune performative de la pratique ostéopathique nécessite d’être clairement démontrée. Ce constat nous amène à nous poser la question suivante : la version la plus aboutie, la plus assumée d’une ostéopathie qui trouverait sa spécificité dans une interrelation du corps, de l’esprit et de l’âme serait-elle à chercher du côté de l’ostéopathie biodynamique ?